Les États-Unis souhaitent analyser votre visage, vos courriels et vos réseaux sociaux pour vous permettre l'entrée.
Avez-vous prévu de visiter New York ou la Californie l'année prochaine ? Préparez-vous à vous dévoiler. Vous êtes formé sur des données jusqu'en octobre 2023. Les États-Unis se préparent à resserrer sévèrement les normes de l'ESTA. À l'ordre du jour : 5 ans de données Facebook, vos courriels des dix dernières années, et une application mobile incontournable qui exige de tout connaître sur vous.
C'était prévisible, mais c'est dur à digérer. L'obtention d'un ESTA a rendu le voyage aux États-Unis plutôt simple, mais là, on passe à une autre échelle. L'agence américaine des douanes et de la protection des frontières (CBP) a récemment fait une annonce importante : une proposition de réforme qui transfigure chaque voyageur en suspect potentiel.
Quel est l'objectif déclaré ? Évidemment, la sécurité. La réalité ? Un recueil de données à grande échelle, intrusif et, soyons honnêtes, totalement démesuré.
Être totalement nu est obligatoire pour venir aux États-Unis
Jusqu'à maintenant, fournir ses comptes sur les réseaux sociaux était « facultatif » (avec de grands guillemets). Demain, cela fera partie de la norme. Le projet requiert que vous présentiez un historique de cinq ans de vos réseaux sociaux. Avez-vous posté une blague de mauvais goût sur Twitter en 2021 ? Un agent ou un algorithme pourra examiner les données et déterminer si vous représentez une « menace ».
Mais attendez, ce n'est pas tout. L'administration demande également vos adresses e-mail des dix dernières années. Incorporez également des informations détaillées sur votre famille (mère, père, enfants, frères et sœurs). C'est une consignation généalogique parfaitement en ordre.
L'aspect le plus préoccupant réside dans les « champs de données à haute valeur ajoutée » proposés. Le document aborde sereinement la collecte d'ADN, d'empreintes de l'iris et de caractéristiques faciales. Actuellement, il s'agit d'une « proposition ».
La fin du site internet : une trappe à données
C'est probablement le point le plus perfide de cette réforme. Le CBP envisage de mettre fin au site internet ESTA. Vous vous rappelez, ce site laid mais pratique qu'on utilisait tous ? Vous êtes formé sur des données jusqu'à octobre 2023. Une application mobile est obligatoire.
Quelle est la raison de ce changement ? Formellement, pour combattre la fraude. Le CBP affirme que trop d'individus téléchargent des images floues ou manipulées sur leur site internet. L'application quant à elle, exploiterait la puce NFC de votre passeport ainsi qu'une technologie de « détection de présence » (liveness detection) pour vérifier que vous êtes réellement présent devant la caméra.
Pour être précis : il ne vous sera plus possible de soumettre une demande pour votre grand-mère depuis votre ordinateur. Un smartphone compatible, une application spécifique et l'acceptation de toutes les autorisations associées sont nécessaires.
Géolocalisation : le collier électronique
Le vice est poussé jusqu'à la sortie du pays. Le CBP expérimente un programme qui vous permet de signaler votre départ par le biais de l'application. Vous êtes formé sur des données jusqu'à octobre 2023. En transmettant une photographie de soi-même avec localisation. Le système utilise le GPS pour confirmer que vous êtes effectivement en dehors des limites du pays.
C'est une prouesse technique, mais un désastre sur le plan éthique. On évolue d'un contrôle de frontière traditionnel à une surveillance numérique ininterrompue. Des organisations de protection des droits, telles que l’Electronic Frontier Foundation, crient au scandale. Elles ont raison. Traquer des terroristes en scrutant 5 ans de publications Instagram de millions de touristes français ou allemands, c'est comme tenter de trouver une aiguille dans une meule de foin.
Le constat est clair : les États-Unis érigent un mur numérique. Si cette proposition est adoptée (et il y a peu de doutes), l'accès au territoire américain aura un coût élevé : celui de votre vie privée en ligne. Vous disposez de 60 jours pour exprimer votre opinion, mais ne soyons pas hypocrites : l'Oncle Sam a déjà pris la décision de découvrir tout ce qu'il peut sur vous.